Cher Connard de Virginie Despentes, Grasset

 

 La crise du milieu de vie est une étape de transition où s’installe une sorte de nostalgie parfois obsessionnelle empreinte d’un sentiment d’insatisfaction permanent. C’est ce que vivent les deux personnages du nouveau roman de Virginie Despentes “Cher Connard”.

la romancière passe au crible deux personnages qui se débattent tant bien que mal contre ce mal-être, contre leurs addictions, leurs contradictions, leurs erreurs, leurs convictions, contre ce temps qui passe. 

Arrivée à la cinquantaine, Rebecca, actrice sur le retour n’est plus cette  "femme sublime” qui a marqué l'histoire du cinéma français. Oscar, écrivain et fan absolu pour l’avoir connue dans sa jeunesse, la rencontre un jour par hasard à Paris. La déception est si forte qu’il écrit inconsidérément sur son compte Instagram  : ‘ « Cette femme sublime qui initia tant d’adolescents à ce que fut la fascination de la séduction féminine à son apogée, devenue aujourd’hui ce crapaud. Pas seulement vieille. Mais épaisse, négligée, la peau dégueulasse, et son personnage de femme sale, bruyante. La débandade. On m’a appris qu’elle s’était convertie en égérie pour jeunes féministes. L’internationale des pouilleuses a encore frappé. » 

"J'espère que tes enfants crèveront écrasés sous un camion et que tu les regarderas agoniser sans rien pouvoir faire et que leurs yeux gicleront de leurs orbites et que leurs cris de douleur te hanteront chaque soir", lui répond l'actrice, avant de le traiter de "bouffon".

Le ton est donné. Commence alors une relation épistolaire entre un auteur harceleur, une jeune fille harcelée et une actrice aux dents acérées alors que le monde s'apprête à vivre la plus grosse crise sanitaire de son histoire… .    

Qui est  Rebecca, actrice sulfureuse devenue une fervente féministe et qui est Oscar,  ce jeune homme timide et mal dans ses bottes devenu écrivain reconnu qui utilise sa petite notoriété d’écrivain pour séduire ? Que vont bien pouvoir se raconter ces deux personnages que tout oppose ?  Et puis il y a Zoé, son ancienne attachée de presse qui l’accuse sur son blog  de harcèlement sexuel. Oscar passe du rang d’écrivain reconnu à “un connard en modèle courant” selon Rebecca. Ces deux personnages vont finir par nouer le dialogue, partager leurs idées et s’écouter pour se comprendre.

Au travers ces échanges épistolaires via les mails et  légèrement teintés de mélancolie, Virginie Despentes dépeint avec mordant  la société française, passe en revue tous les sujets qui font l’actualité, elle dresse une sorte d’état des lieux de notre société, elle interroge notamment  ce qui reste du féminisme et plus largement de la rébellion, de la fête, des plaisirs  mais aussi  de l'amour, de la vie.

Un roman qui n’en est pas un. Un essai de sociologie qui n’en est pas un. Un roman d’amour ou d'amitié qui n’en est pas un. Juste un roman qui a fait parler de lui, parce que son auteur est hors normes. Rien ne m’a surpris, rien ne m’a choqué, tout m’y a ennuyé !